Extrait du Journal officiel île la République française des 27 Juin et 1er Juillet iÔQ3
DISCOURS
l'HONONOK* l'Ail
M. HENRI WALLON
SENATEUR INAMOVIBLE
SÉANCES DU SÉNAT DES 26 ET 30 JUIN 1903
PROJET DE LOI
RELATIF A I.A
CONSTRUCTION D'OFFICE DES MAISONS D'ECOLE
PARIS
IMPRIMERIE DES JOURNAUX OFFICIELS 31, QUAI VOLTAIRE, 31
I 903
Extrait du Journal officiel de la République française des 27 Juin et 1«' Juillet 1903
DISCOURS
PRONONCÉS PAR
M. HENRI WALLON
SÉNATEUR INAMOVIBLE
SÉANCES OU SÉNAT DES 26 ET 30 JUIN 1903
PROJET DE LOI
relatif a t.a
CONSTRUCTION D'OFFICE DES MAISONS D'ÉCOLE
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PARIS
IMPRIMERIE DES JOURNAUX OFFICIELS
31, QUAI VOLTAIRE, Il I
I 90 3
Extrait du Journal officiel de la République française
des 27 Juin el 1" juillet 1903
DISCOURS
PRONONCÉS PAR
M. HENRI WALLON
senateur
SÉANCE DU SÉNAT DU 26 JUIN 1903
M. Wallon. Je demande la parole contre l'urgence.
M. le président. La parole est à M. Wal­lon contre l'urgence.
M. Wallon. Messieurs, je demande la pa­role contre l'urgence afin que la loi ne soit pas votée avant la session des conseils gé­néraux ; et voici, en deux mots, mes rai­sons.
Vous êtes les élus du suffrage universel, et c'est là ce qui vous donne des pouvoirs égaux il ceux de la Chambre des députés;
mais vous êtes élus par des délégués issus eux-mêmes du suffrage universel : conseil­lers généraux, conseillers d'arrondisse­ment et délégués des conseils municipaux.
Gambetta l'a dit : le Sénat est le grand conseil des communes de France.
Or la loi qui vous est proposée enlève, sur une question considérable, aux conseils généraux et aux conseils municipaux la plus précieuse de leurs attributions, celle de dis­poser en cette matière des fonds des dépar­tements et des communes.
Avant de leur porter ce coup fatal, il est bon, il est nécessaire que vous entendiez la voix de vos électeurs.
Ne pas le faire, ce serait montrer bien peu do confiance en leur patriotisme ou bien peu de respect pour leurs droits. (Très bien! très bien! et applaudissements.)
SÉANCE DU SÉNAT DU 30 JUIN 1903
M. le président. Messieurs, avant de mettre aux voix l'ensemble de la loi, je donne la parole à M. Wallon qui l'a deman­dée pour motiver son vote.
M. Wallon. J'ai demandé à expliquer mon vote, d'abord parce que je repousse "cette loi comme se rattachant à un sys­tème qui se continue d'une manière trop abusive.
M. le président du conseil déclare qu'il se tient rigoureusement dans la légalité ; il s'y meut, disons-le, bien à l'aise !
Si la loi dont il poursuit l'application ne se prête point à ses vues, il en fait voter, comme par supplément, une autre qui lui dorme toute satisfaction; même aux dépens du droit commun, je dirais même volon­tiers du sens commun. (Mouvements divers.) Telle la loi du 4 décembre dernier, qui, au mépris de la langue française et de l'arith­métique, voit une congrégation dans une seule personne; telle la loi actuelle qui, n'en déplaise à M. le ministre de l'instruc­tion publique, sacrifie aux exigences injus-
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qu'on le mit en. accusation lui-même ! Qu'avait-il fait ? Ce que, le comité de salut public, disait-il, l'avait chargé de faire : il avait appliqué la loi du 22 prairial et les autres lois révolutionnaires de l'an IL — Et c'était- vrai.
Mais quelles sont ces lois que le Gouver­nement veut faire appliquer aujourd'hui, et sont-ce bien des lois?
Ces lois, en vertu desquelles on expulse aujourd'hui les religieux, sont des lois in­constitutionnelles etradicalement nulles. La loi, d'après la Constitution, ne peut résulter <[ue de l'accord des deux Chambres. Or, aucune de celles qui ont été votées à la Chambre des députés et que l'on applique, n'a été présentée au Sénat. (Très bien! très bien! à droite et au centre.)
.N'ayant donc pas eu l'occasion d'en par­ler ici et croyant utile d'en exprimer mon opinion, je l'ai l'ait par une lettre du 11 avril au Journal des Débats; et vraiment, je ne trouve pas dans le langage parlementaire de terme assez fort pour caractériser de pa­reils factums.
Exemple : « Article unique. —La demande d'autorisation formée par la congrégation (le nom de la congrégation) par application des articles 13 et 18 de la loi du Ier juillet
liliées do la loi du 1" juillet 1901 les préro­gatives essentielles des conseils généraux et des conseils municipaux.
J'appliquerais volontiers à cette manière de procéder l'épigraphe d'une affiche de Camille Desmoulins, que j'ai inscrite moi-même en tête de la préface de mon Histoi.ro du tribunal révolutionnaire de Paris :
ci Ce sont les despotes maladroits qui se servent des baïonnettes : l'art de la tyrannie est de faire les mêmes choses avec des juges. (Tacite, historien factieux et incen­diaire.) »
Les juges, en vérité, je les plains. La jus-lice, en France, est bien vacillante aujour­d'hui dans l'application de ces lois et de ces décrets sur les congrégations. Un tribunal absout, un autre condamne dans des espèces exactement pareilles, quoique distinctes. Je n'accuse pas ces juges : dans l'un et l'autre cas, ils croient bien appliquer la loi. Je m'en prends au Gouvernement, auteur des lois ou décrets qu'ils appliquent.
Ainsi,au tribunal révolutionnaire,puisque je l'ai cité, Fouquier-Tinville, qui requit contre Robespierre et Saint-Just, comme il avait requis contre leurs victimes, s'éton­nait, après le 9 thermidor, qu'on ne le main­tînt pas dans son office d'accusateur public :
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1901, est acceptée; en conséquence, ladite congrégation est autorisée, à la charge de se conformer aux statuts présentés. » Et le décret qui ordonne l'envoi porte : « Le projet de loi dont La teneur suit sera présenté à la Chambre des députés par le président du conseil, ministre de l'intérieur et des cultes, et par le ministre de l'instruc­tion publique et des beaux-arts, chargés d'exposer l'avis du Gouvernement et de soutenir la discussion. »
J'avais cherché d'abord une congrégation dont je savais l'établissement fort bien tenu. Bon, me dis-je, on veut l'autoriser. Je re­gardai les suivantes et j'y trouvai la môme formule. Gela m'a inspiré des doutes, et je me reportai à l'exposé des motifs. Je vis seulement alors que le législateur y donnait des raisons pour les condamner toutes! — et cependant c'est lui qui avait écrit pour chacune d'elles : « La demande d'autorisa­tion.....est acceptée; en conséquence, ladite
congrégation est autorisée, à la charge de se conformer aux statuts présentés! »
Quelle idée se fera-t-on du législateur français chez nos voisins?
Quant à la manière dont le vote des 54 projets a été préparé et effectué à la Chambre des députés « tous dans le même sac, puis en trois sacs également scellés
et plombés », nous avons entendu, samedi dernier, M. Waldeck-Rousseau.
Ce qui en résulte et ce qui était la con­clusion de mon article au Journal des Débats, c'est qu'il n'y a pas eu de loi votée, on n'en trouve aucune trace dans la partie officielle du Journal officiel. Il n'y a pas eu non plus d'autorisation accordée : ce qui fait que les congrégations dont il s'agit restent dans le statu quo; car l'article 13, paragraphe 1er, de la loi du 1er juillet, ne concerne point le passé : « Aucune congré­gation religieuse ne peut se former sans une autorisation donnée par une loi qui déterminera les conditions de son fonction­nement. »
Les congrégations existent donc, quoi­qu'elles aient été supprimées par les lois de la Révolution ; car elles ont été rétablies en principe par le Concordat, qui porte :
« Le Gouvernement de la République re­connaît que la religion catholique, apostoli­que et romaine est la religion de la très grande partie du peuple français. »
Or, la religion catholique, apostolique et romaine comprend, depuis son établisse­ment, un clergé séculier et un clergé régu­lier. Je l'ai dit au début de la discussion sur la loi des associations, et la question
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pourra être reprise quand les nouveaux pro­jets viendront au Sénat.
Les congrégations existent donc de par le Concordat. Elles ont été reconnues, sinon, pour la plupart, comme établissements d'u­tilité publique, au moins comme existantes de fait, en raison des taxes spéciales qui leur ont été imposées : elles peuvent dire selon la formule de Descartes : Je paye, donc je suis. (Rires approbatifs adroite et au centre.)
Elles doivent donc être maintenues, puis­que leurs demandes d'autorisation, selon l'article 18 de la loi du 1er juillet, ont été ac­ceptées; elles doivent être maintenues jus­qu'à ce qu'une loi, en bonne et due forme, après examen régulier, ait prononcé sur leur sort. Dans ces conditions, il n'y a pas lieu de pourvoir, pour le moment, au vide que leur suppression pourrait faire, et c'est pourquoi je vote contre le projet de loi. (Très bien! très bien!— Applaudissements sur les mêmes bancs.)
Paris. — Imp. des Journaux officiels, 31, quai Voltaire.